Tous les articles par paalabres-adm

English reference : George Lewis « Afterwords… »

George Lewis, « Afterwords to « Improvised Music after 1950 »: The Changing Same », was published in The Other Side of Nowhere, Jazz Improvisation, and Communities in Dialogue, eds. Daniel Fischlin and Ajay Heble, Middeltown, Connecticut: Wesleyan University Press, 2004, p. 163-172.

The original essay, “Improvised Music after 1950”, was published in Black Music Research Journal in 1996 by the Center for Black Music Research – Columbia College, Chicago.

Return to the French text.

Transversal : culture au pluriel


Une échappée transversale : culture au pluriel

Traverser vers Hybride, vers Créolisation, retourner à TRANSVERSAL

Culture au pluriel :

Notre époque se caractérise par une multiplication des sources de données et champs de savoirs accessibles, donc augmente de façon exponentielle les chances et possibilités de croisements, rencontres, détournement, transformations, etc. Ce qui nous contraint àla complexité : sa prise en compte devient absolument nécessaire, en commençant par les trois principes travaillés par Edgar Morin dans son « paradigme de complexité » (voir Introduction à la pensée complexe, éd. ESF 1990, pp. 98-101). :

  • dialogique, c’est-à-dire deux logiques antagoniques et contradictoires mais indissociables et indispensables pour comprendre une même réalité
  • de récursion ou d’influence réciproque, c’est-à-dire à la fois et dans le même temps causes et effets, produit et producteur
  • hologrammatique, présenté contre le « paradigme de simplification », c’est-à-dire le tout est dans les parties, les parties sont dans le tout.

L’exploration des principes de complexité développés par Edgar Morin nous amène à l’idée de confort inconfortable. Plus on connaît et pratique un terrain de jeu musical en finissant par s’y sentir tranquillement à son aise, en terme de maîtrise notamment, plus on connaît, en fait, ses zones d’ombre et ses frontières-lisières avec les moyens d’aller s’y frotter, premières sources d’imprévus et de surprises : le confort peut donc être source facile d’inconfort. Et réciproquement, être en position délicate d’inconfort peut être l’amorce de la construction d’un nouveau confort. Une double dynamique fructueuse permet de mieux saisir le type de « confort » intéressant à chercher et à construire.

C’est ainsi qu’on peut saisir les spécificités des pratiques artistiques nomades et transversales. Elles proposent une conception de l’art qui ne se réduit pas à l’analyse des œuvres et à la discussion sur leur valeur, mais qui met en relation interactive le matériau, les gestes qui permettent le traitement de ce matériau, les modalités d’utilisation des matériaux, la distribution des fonctions et des rôles des participants, les rapports collectifs au sein des groupes d’artistes, les relations au public, les logiques de transmission, d’appropriation, de médiation, d’éducation et d’enseignement, jusqu’au rapport plus large au social et au politique. En somme tout ce qui constitue la fabrication d’une pratique. Il s’agit aussi de mettre en relation les pratiques dans leurs diversités, de les comparer, de les confronter et éventuellement de les combiner. Cette interactivité des divers éléments d’élaboration des pratiques et des pratiques diversifiées noue les conditions d’une nouvelle définition de la recherche tant dans ses aspects de ce qui permet aux pratiques d’exister, que de ce qui constitue un regard critique et réflexif sur les pratiques.

Dans un ouvrage annonçant de façon prémonitoire la très grande diversité culturelle à laquelle nous avons à faire face aujourd’hui en l’absence d’une fondation universelle solide, (La culture au pluriel, Paris : Christian Bourgeois, 1980), Michel de Certeau notait la chose suivante :

« Ce qui devient central, c’est l’acte culturel propre au « collage », l’invention de formes et de combinaisons, et les procédés qui rendent capable de multiplier les compositions. Acte technique par excellence. L’attention se porte donc vers les pratiques. » (p.108).

Pour lui, l’intérêt se porte non plus sur les « produits », mais sur les « méthodes de production ». Il ne s’agit donc plus, dans l’enseignement supérieur, de se contenter d’exposer les résultats d’une recherche, mais, « à travers une praxis collective », d’expliciter les manières de les obtenir.

Avec la disparition des principes universels qui caractérise la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, les modèles théoriques dominants ne permettent plus de « penser le pluriel de systèmes imbriqués et sédimentés ». Nous n’avons aucun autre choix de procéder par tâtonnements face à des situations particulières dans lesquelles s’inscrivent des actions (voir p. 187). C’est ainsi que, concernant « l’espace des pratiques », il note qu’il y a un malaise persistant : « la culture, c’est le mou » (p. 233). Les actions des usagers ne correspondent pas du tout aux intentions ceux qui rationnellement planifient le monde. La face dure est constituée par la technocratie qui tente de coloniser le monde en rentabilisant la « fabrication des signifiants » (p. 234). La société de consommation transforme le peuple en public. Toutes les voix minoritaires du monde sont entendues projetées par les médias, mais elles tendent à être instantanément classifiées et répertoriées dans des musées ou dans des écritures figées : elles « cessent alors de parler et d’être parlées ». Il parle d’une frontière qui ne fait passer que ce qui est déjà mort :

« Cette frontière circonscrit ce que nous pouvons dire et faire du lieu où nous parlons. Rien des autres ne traverse cette limite sans nous arriver mort. La pratique et la théorie de la culture accèdent à l’honnêteté quand nous renonçons à la prétention de surmonter par des généralités la coupure qui sépare entre eux les lieux où s’énonce une expérience. Du savoir scientifique, lorsqu’il est exclusif, jusqu’aux discours indigents sur les « valeurs » ou sur l’humanisme, il y a mille manières d’éliminer d’autres existences. Elles ont pour caractéristique commune la volonté d’instaurer l’unité, c’est-à-dire un totalitarisme. La culture au singulier impose toujours la loi d’un pouvoir. A l’expansion d’une force qui unifie en colonisant, et qui dénie à la fois sa limite et les autres, doit s’opposer une résistance. Il y a un rapport nécessaire de chaque production culturelle à la mort qui la limite et à la lutte qui la défend. La culture au pluriel appelle sans cesse un combat. » (p. 241)

Contributions du collectif PaaLabRes — 2015

Traverser vers Hybride, vers Créolisation, retourner à TRANSVERSAL

 


 Pour un itinéraire-chant vers…


 

Transversal : créolisation


Une échappée transversale : créolisation

Traverser vers Hybride, vers Culture au pluriel, retourner à TRANSVERSAL

 

Créolisation (selon Edouard Glissant) :

Edouard Glissant définit sa notion-clé de « créolisation » comme la confrontation d’éléments disparates appartenant à plusieurs cultures distinctes, ce qui est susceptible de créer des choses nouvelles complètement imprévisibles qui vont bien au-delà d’une juxtaposition culturelle ou même d’une synthèse négociée des divers éléments en présence.

Edouard Glissant précise sa pensée de la manière suivante :

« Le monde se créolise, c’est-à-dire que les cultures du monde mises en contact de manière foudroyante et absolument consciente aujourd’hui les unes avec les autres se changent en s’échangeant à travers des heurts irrémédiables, des guerres sans pitié, mais aussi des avancées de conscience et d’espoir qui permettent de dire – sans qu’on soit utopiste, ou plutôt , en acceptant de l’être – que les humanités aujourd’hui abandonnent difficilement quelque chose à quoi elles s’obstinaient depuis longtemps, à savoir que l’identité d’un être n’est valable et reconnaissable que si elle est exclusive de l’identité de tous les autres êtres possibles. »
(Introduction à une poétique du divers, Paris :Gallimard, 1996, p. 15)

Glissant utilise l’image de la « circularité », de la spirale, pour l’opposer à la « projection en flèche » de la colonisation (Introduction à la poétique du divers, p. 14). Pour lui, une trace mémorielle, comme celle reconstituée par les esclaves noirs des Amériques et « valable pour tous » s’oppose à la « pensée de systèmes » et « des systèmes de pensées » prétendument universels (p. 17). Il dit : « La trace suppose et porte non pas la pensée de l’être mais la divagation de l’existant » (p. 69). La créolisation selon lui ne peut se faire que si les éléments culturels en présence sont rigoureusement « équivalents en valeur », de façon à ce qu’un groupe culturel donné n’impose pas ses méthodes, pratiques et conceptions sur un autre. Il choisit le terme créolisation de préférence à métissage car, dit-il, « la créolisation est imprévisible alors qu’on pourrait calculer les effets du métissage » (p. 19). Il voit la créolisation comme un processus dynamique qui ne peut pas se décréter par avance, elle doit émerger d’un parcours, d’une traversée.

Contributions du collectif PaaLabRes — 2015

Traverser vers Hybride, vers Culture au pluriel, retourner à TRANSVERSAL

 


 Pour un itinéraire-chant vers…


 

Transversal : hybride


Une échappée transversale : hybride

Traverser vers Créolisation, vers Culture au pluriel, retourner à TRANSVERSAL

Hybride :

Les pérégrinations transversales peuvent nous mener au caractère hybride de beaucoup de démarches artistiques : un objet hybride ne peut être définitivement catégorisé dans un domaine défini. Depuis longtemps déjà, des artistes ont travaillé sur des formes se situant aux frontières des domaines artistiques : poésie sonore et/ou graphique, théâtre musical, partitions musicales graphiques, sculptures sonores, etc. En créant des objets artistiques hybrides, ils ont tenté de se démarquer de la notion dominante d’autonomie de l’art et de la séparation stricte entre danse, musique, théâtre et arts plastiques. Cette idée d’objet composite inclut tout acte artistique qui mêle de manière entrelacée au moins deux domaines de pensée habituellement séparés Il ne s’agit pas d’une simple superposition de spécialités se combinant dans un spectacle, comme dans l’opéra par exemple, mais bien d’un acte ou d’un objet dont la perception par le public peut être interprétée comme faisant partie d’un domaine ou d’un autre ou des deux à la fois. Pour prendre un exemple, l’idée de typoésie développée par Jérôme Peignot qui combine le caractère visuel de la typographie avec la poésie contenue dans le groupement des lettres, mêlant de manière indissociable le fond et la forme. Cette pratique, très présente dans les mouvements d’avant-garde au vingtième siècle, peut être perçue à la fois comme poésie (texte), arts plastiques (signes distribués dans l’espace) et musique (rythmique des signes éclatés et onomatopées).

Concernant la définition d’hybride, au détour de quelques pages d’internet et de dictionnaires, on peut lire : qui provient d’un croisement naturel ou artificiel de deux variétés différentes (synonyme : mélangé, métis, croisé), et au figuré, qui n’appartient à aucun genre particulier; qui est bizarrement composé d’éléments divers, disparates et surprenants (hétéroclite, composite, bâtard).

Il est possible de qualifier la pratique artistique en général comme un « hybride multiforme de bricolage en contexte ». Des termes comme « pluriel » ou « multiple » pourraient aussi être proposés, mais ces adjectifs sont déjà largement utilisés pour qualifier les « métiers » artistiques, souvent sans se rapprocher des pratiques et manières de faire de tous ceux qui, parfois sans le dire, musiquent, dansent, graphiquent, etc., en bricolant (Claude Levi-Strauss) et en braconnant (Michel de Certeau) allègrement. On peut détailler les pratiques artistiques en six noyaux d’activités différentes, à « distinguer pour mieux relier » (Cette heureuse expression précise le but d’une analyse qui décompose, elle s’inspire des écrits d’Edgar Morin et d’Edouard Glissant) : création, performance, médiation-formation, recherche, administration, technique-lutherie. Il n’existe pas de frontière entre elles, elles s’étendent en continu dans des lisières d’entrecroisement, elles sont mouvantes et se superposent très souvent. Et notre hypothèse est que chaque pratique artistique s’hybride parmi toutes les variétés d’interactions. Et tout cela, couramment en revendiquant une façon jubilatoire de procéder !

Contributions du collectif PaaLabRes — 2015

Traverser vers Créolisation, vers Culture au pluriel, retourner à TRANSVERSAL

 


 Pour un itinéraire-chant vers…


 

Liste des contributeur·ices

Retour à l’EDITORIAL 2016

 


Liste des contributrices et contributeurs
Édition 2016, « Plan PaaLabRes :

Sophie Agnel, pianiste. De formation classique, échappée du jazz (duquel le trop strict traitement de l’harmonie l’a détournée), Sophie Agnel aborde le piano sous tous les angles sonores qu’offre ce navire musical : clavier, cordes et cadre sont appréhendés simultanément, dans une démarche mixte (comme on le dit de certaines techniques en peinture) qu’il serait réducteur de rabattre sur la définition cagienne de piano préparé. Envisageant l’instrument – qu’elle étend par maints accessoires, gobelets, boules ou cordes – comme un poétique pourvoyeur de matières et textures anamorphiques, la musicienne l’amène à faire jeu égal avec les dispositifs musicaux les plus divers, de quelque lutherie qu’ils relèvent (du physiologique à l’électroacoustique…)
sophieagnel@free.fr

Jorge Alcaide, compositeur, multi instrumentiste, poète, acteur. Gothenburg.
http://kulturtemplet.wix.com/kulturt

Felipe Amorim, flûtiste, compositeur. Belo Horizonte, Brésil.
http://www.foamorim.net/home
foamorim@gmail.com

Cécile Apsâra, conseillère, chorégraphe, danseuse et enseignante, spécialisée dans le flamenco, vit à Rennes. Avec le flamenco au cœur de son travail, elle a créé de nombreux spectacles alliant tradition et modernité. En outre, Cécile Apsâra est très soucieuse de préserver la transmission du répertoire traditionnel flamenco, qui reste à la source de toute création et fait partie d’un patrimoine vivant.
cecileapsara@gmail.com

Hélène Barré, pianiste, enseigne au conservatoire de Valence et au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
helene.barretok@gmail.com

Ernest Bergez pratique une forme bricolée et spontanée de live électronique qui combine les manipulations de la musique concrète avec les techniques du dub jamaïcain et les assauts de la noise music. Il enseigne actuellement au CRA.Pw/a> à Lyon et intervient au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
http://si-collectif.com/

John Bischoff (1949) is a composer known for his solo constructions in real-time digital synthesis. He was a pioneer in the development of computer network music. He was a founding member of the League of Automatic Music Composers in 1978, which is considered the world’s first computer network band. He is also one of the founding members of The Hub, which since 1987 has continued to develop the network music form. He is currently associate professor in the Mills College Music Department in Oakland, California.
http://www.johnbischoff.com

Stephan Bonnard, auteur, diseur, performeur, co-animateur du projet KompleX KapharnaüM.

Ben Boretz, compositeur, improvisateur, éditeur de Perspectives of New Music et de Open Space Magazine.
boretz@bard.edu

David Borgo – saxophoniste, ethnomusicologue et professeur au département de musique de l’Université de Californie San Diego
http://davidborgo.com
dborgo@ucsd.edu

Samuel Chagnard, musicien, membre de PaaLabRes, formateur au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes, doctorant au Centre Max Weber, équipe Dispositions, pouvoirs, cultures, socialisations.
http://sociomusic.hypotheses.org/

Guigou Chenevier, batterie, percussions, compositions. Fait partie du second cercle de PaaLabRes.
guigouchenevier@no-log.org

Dominique Clément, compositeur, clarinettiste, membre de l’Ensemble Aleph, directeur adjoint du Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
clementdomi@gmail.com

Eric de Clercq, compositeur, réalisateur de films, Amsterdam. Membre du collectif de compositeurs Monoták.
http://www.ericdeclercq-composer.nl
http://www.monotak.nl

Marina Cyrino, musicienne (Brésil), Gothenburg.
contact : marcyrino@gmail.com

Vincent Desplanche, né à Lyon en 1969, est un illustrateur, aquarelliste et graveur diplômé de l’école des Arts Décoratifs de Strasbourg. Il a illustré à ce jour plus de 40 livres documentaires pour la jeunesse. Inconditionnel du carnet de croquis, il participe au mouvement international Urban Sketchers adapte parfois ses croquis en estampes sur bois selon la technique japonaise du Moku Hanga.
C’est lui qui a réalisé le plan du métro PaaLabRes.
http://www.vincentdesplanche.blogspot.com
http://www.behance.net/watercolorsoffrance

Julien Desprez, musicien (guitare électrique) et performer. Basé à Paris, il est issu du jazz et du rock et il a évolué vers des formes libres dans lesquelles le corps et l’espace trouvent leur place à travers les sons. Il évolue entre l’art sonore, la performance et la musique contemporaine improvisée. Il est le co-fondateur du Collectif Coax (Paris).
http://www.juliendesprez.com/

Mark Dresser, contrebassiste, compositeur et collaborateur interdisciplinaire. Depuis 2007 il est très impliqué dans l’organisation de concerts de « musique télématique » qui explorent les dimensions musicales, techniques et sociales de performances vivantes se déroulant dans des lieux éloignés en utilisant Internet. Il est professeur à l’Université de Californie San Diego.
http://www.mark-dresser.com

Jean-Charles François, percussionniste, compositeur, membre de PaaLabRes, du trio d’improvisation PFL Traject et de l’Ensemble Aleph.
jeancharles.francois@orange.fr

Reinhard Gagel, musicien, Exploratorium, Berlin.
Reinhard.Gagel@gmx.de

Madeleine Jonsson Gille,  compositrice, improvisatrice, voix. Gothenburg.
mjgille@gmail.com

Yovan Gilles : co-animateur de la revue et collectif Les périphériques vous parlent, ayant une activité artistique connexe (danse, musique, théâtre, vidéo)
Site internet : http://www.lesperipheriques.org

Laurent Grappe, musicien, membre de PaaLabRes.
grappe.laurent@neuf.fr

Dominique Grimaud (alias Grimo) est un musicien français poly-instrumentiste autodidacte, marqué dans son enfance par des visites, à Chartres où il habite, de la « Maison Picassiette » et l’approche de son créateur Raymond Isidore.

Cécile Guiller, musicienne éclectique et enseignante en Haute-Loire.
guillierc@wanadoo.fr

Karine Hahn, musicienne, membre de PaaLabRes, enseignante au CNSMD de Lyon.
hahnkarine@gmail.com

Monica Jordan, voix, fondatrice de l’Ensemble Aleph en 1983. Interprète des classiques du 20ème siècle, elle effectue en collaboration avec des compositeurs des recherches dans le domaine des techniques vocales liées à l’électroacoustique et au théâtre musical. Elle a longtemps enseigné l’analyse et la musique contemporaine à l’ENM de Créteil.
http://ensemblealeph.com

Merje Kägu, guitariste (Estonie) Gothenburg.
merjekagu@gmail.com

Jeff Kaiser – trompettiste, compositeur, spécialiste de l’utilisation des technologies musicales. Il enseigne à l’Université de San Diego en Californie.
http://jeffkaiser.com
jkaiser@ucsd.edu

Anne La Berge, flûtiste, compositeur, improvisateur (Amsterdam). Elle est connue pour l’utilisation de textes énigmatiques dans ses compositions et improvisations. Elle fait activement partie du collectif Splendor Amsterdam, formé de 50 musiciens, compositeurs et artistes du spectacle vivant.
http://www.annelaberge.com
http://www.volsap.nl
http://www.splendoramsterdam.com

Etienne Lamaison est clarinettiste et titulaire d’un Doctorat en Interprétation musicale de l’Université d’Évora (Portugal). Sa thèse s’intéresse à l’interprétation des partitions graphiques non procédurales, c’est-à dire, celles pour lesquelles ni une temporalité ni un sens de lecture n’est imposée par leur auteur.
elamaison@sapo.pt

Gilles Laval, musicien, membre de PaaLabRes, du trio d’improvisation PFL Traject, responsable du département de rock à l’ENM de Villeurbanne.
gilleslaval@free.fr

Michel Lebreton : je pratique les musiques du Centre France et d’autres espaces sur la musette du Berry ainsi que la transmission d’objets musicaux.
http://leschantsdecornemuse.fr/index.html
lebreton.mic@gmail.com

Noémi Lefebvre, écrivain, chercheur en sciences politiques, membre de PaaLabRes, responsable du Centre d’études sur les pratiques d’enseignement musical au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
lefebvre.noemi@neuf.fr

George Lewis, compositeur, improvisateur, Edwin H. Case professeur de Musique Américaine à la Columbia University, New York.
gl21400@gmail.com

Rob Mazurek, compositeur électroacoustique, improvisateur, cornettiste artiste multimédia. Il a d’abord émergé de la scène musicale créative du Chicago des années 1990 et est devenu un explorateur du monde sonore dans une multitude de contextes stylistiques. Mazurek est membre (entre autres) du Exploring Star Orchestra, du Chicago Underground, et du São Paulo Underground. http://robmazurek.com

Marina Nazareth, peintre, dessinatrice, graveuse, sculptrice et professeur. Belo Horizonte, Brésil.
http://marinanazareth.com.br
marinanazareth@ig.com.br

Pascal Pariaud, instrumentiste, souffleur de tuyaux, chanteur et chef de choeur, improvisateur, membre de PaaLabRes, membre de PFL-Traject, d’un duo de Poésie sonore et de divers ensembles sur instruments anciens.
pascalpariaud@gmail.com

Alexandre Pierrepont, anthropologue. Il travaille sur les phénomènes de « double conscience » et les altérités internes aux sociétés occidentales. Il est chercheur associé aux laboratoires du Canthel à Paris et du Cerilac à Paris 7, et à l’International Institute for Critical Studies in Improvisation (IICSI), enseignant dans diverses universités et institutions des deux côtés de l’Atlantique. Conseiller artistique et directeur de projets dans « les mondes du jazz », coordonnateur du réseau d’échanges transatlantiques The Bridge, il est notamment l’auteur de Le Champ jazzistique (Parenthèses, 2002) et de La Nuée. L’AACM : un jeu de société musicale (Parenthèse, 2015). Il conspire régulièrement avec des improvisateurs sur les rapports rêvés entre musique et poésie.
http://wordpress.acrossthebridges.org

Claire Haranger-Segui, musicienne éclectique, enseigne à l’Académie Musique et Danse de Miribel, et au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
clairesegui@wanadoo.fr

Nicolas Sidoroff, musicien-militant, membre de PaaLabRes, formateur au Cefedem Auvergne Rhône-Alpes.
Entre autre, webm@ster du site…

Claude Spenlehauer, musicien (saxophone bariton, basse électrique) et enseignant. Ces deux activités sont reliées par la notion de projet. Il mène des activités diverses (enseignement du saxophone, ateliers de musiques actuelles, improvisation, formation musicale, formation au slam et à l’écriture de texte, etc.). Il s’investit dans de nombreux projets artistiques allant du rock expérimental au jazzcore, en passant par les musiques électroniques et le slam.
claudesp@gmail.com

Giacomo Spica Capobianco, slameur et multi instrumentiste, est un artiste engagé notamment pour la cause féministe. Directeur de CRA.P, Lyon.
spicag@netcourrier.com

Gérald Venturi, musicien, membre de PaaLabRes, enseignant à l’ENM de Villeurbanne.
gerald.venturi@gmail.com

Jena Whitaker, poète sonore, Baltimore, USA. Sa recherche actuelle porte sur les relations entre la traduction et la création poétique dans les œuvres de trois poètes-traducteurs du 19ème siècle : Nerval, Baudelaire et Mallarmé. Elle les étudie à travers le regard de poètes-traducteurs modernes : Michel Deguy, Yves Bonnefoy, Henri Meschonnic, and Philippe Jacottet.

 

Retour à l’EDITORIAL 2016

English : Editorial

ENGLISH EDITORIAL 2016 “PaaLabRes’ map”

ENGLISH EDITORIAL 2017 “Graphic Scores”

ENGLISH EDITORIAL 2021 “Break down the walls”


PaaLabRes: Artistic Practices in Acts, Laboratory of Research

Welcome on the first version of the digital space PaaLabRes.

PaaLabRes (Pratiques Artistiques en Actes, Laboratoire de Recherches or Artistic Practices in Acts, Research Laboratory) is a musicians’ collective in existence since 2011, which attempts to define the outlines of artistic research led by the practitioners themselves, concerning artistic expressions that do not result in definitive works. In an initial text[1], the collective was defined in the following manner:

“Electronic technologies created the conditions for the emergence of a great diversity of artistic practices, by  allowing considerable access to information about the world and its history. Many practices differentiate themselves both from institutions representing sacred traditions and from commercial cultural industries, in order to invent everyday – very often in a collective manner – their own “art of doing”[2]. We will call these artistic practices “nomadic[3] and transverse”, because they tend to refuse to be fixed in definitive works by continuously reworking matters and techniques according to particular situations, and they tend also to refuse any aesthetic labels (or labels connected to professional identities) by tinkering on an everyday basis along transverse paths.”

PaaLabRes objective is to bring together in action, reflection and research, diverse practices that cannot be closely identified with the definitively fixed patrimonial art forms, nor with the ones imposed by cultural industries. These practices often open ways to collective creation, to improvisation, and to collaborative projects between the arts, including other interactive forms of production.

Questioning the autonomy of art with respect to society, they are grounded in everyday interactions and in contexts that mix art with sociology, philosophy, in transmission activities and education. Because of these features, these practices remain unstable and variable; they are really nomadic and transversal.

The aim of  PaaLabRes is to mix different media in order to develop original art/research facilitated by Internet communication technology. The objectives are to bridge the gaps between a) legitimate research articles and more experimental or poetical texts and more simple reflective contributions; b) artistic productions and artistic education, c) artistic concerns and societal or political questions; d) a very large diversity of artistic categories, styles or fields.

Important information about the practical conditions for realizing the 2016 and 2017 editions of the digital space “PaaLabRes”

The digital space is developed by the collective PaaLabRes, with Nicolas Sidoroff as the principal contributor. The editorial team is composed by Samuel Chagnard, Jean-Charles François and Nicolas Sidoroff.

The totality of the production of the digital space “PaaLabRes” – architecture of the site, creation, translations, technical aspects of the realization – is done with a complete absence of financial means and on the basis of volunteer work. The digital space comes into reality thanks to the participation of artists who can do this because they are salaried in some educational institution or retired from this duty, and who give their time within the limits of their possibilities. These same persons additionally have to carry on with their own research and/or artistic projects, often pursuing a doctoral degree. Some actions (i.e. workshops) carried out by the PaaLabRes collective generate a small percentage in order to pay for the site’s hosting services.

But how can web platforms and communities developing Internet tools (of “framasoft” type) continue to fight the system? How is it possible to escape the invasion of publicity, which is the counterpart of Internet being free of charge?

In the first 2016 Edition, for example, we used “youtube” in order to realize the 72 Itineraries-Songs. This was an “easy” solution to the problem of the enormous space taken by these files, but one which imposed (through “Google”) the presence of publicity. For the 2017 Edition, we have decided to use the platform “viméo”, which appeared to us to correspond more to our sense of ethics, but the inconvenience of the presence of publicity (“Staffpicks”) remains. The trick we have designed to counter it consists in giving ample time to users to click on internal links of the site before the appearance of any publicity.

The issue of the lack of means for alternative research projects and for the use of digital communication tools remains to be debated. All remarks and good ideas on this subject would be very welcome. And more generally any critical feedback on our endeavors would be of great use to us.
Your comments (in english) can be sent at this address: contact[chez]paalabres[pt]org

The  collective PaaLabRes — 2016 — 2017
Samuel Chagnard, Jean-Charles François, Laurent Grappe,
Karine Hahn, Gilles Laval, Noémi Lefebvre,
Pascal Pariaud, Nicolas Sidoroff, Gérald Venturi.

 

In the future other maps, plans, drawings and lines will be added as needed.

The PaaLabRes collective hopes that the formula of digital space, which is in the process of being developed will be able to host varied contributions, from original hybrid artistic forms to fundamental reflections on today’s artistic practices. It is very important to us to be able to present a diversity in the domains of artistic production, of cultural expressions, of different ways to present research, and of mixing medias. Our project is to develop a dialog between the detachment of formal research and the lightness of discourses without objects, passing through the polemist’s irony, and the vigor of political debates. What is at stake is the place of artistic practices in the complicated context of our multiple society, in three strongly interactive areas: practices, teaching/learning, research, with their particular systemic approaches.

The collective PaaLabRes — 2016
Samuel Chagnard, Jean-Charles François, Laurent Grappe,
Karine Hahn, Gilles Laval, Noémi Lefebvre,
Pascal Pariaud, Nicolas Sidoroff, Gérald Venturi.

 


[1] See « 1. Paalabres. Projets de Pratiques Artistiques en Actes, Laboratoire de Recherche », in Revue&Corrigée N°95, March 2013.

[2] See Michel de Certeau, The Practice of Everyday Life, trans. Steven Rendall, University of California Press, Berkeley 1984.

[3] See Daniel Charles, Musiques nomades, Paris : Editions Kimé, 1998.

 

English : Paarticipation


PaaLabRes: Forum of Discussion

The digital space PaaLabRes should also be a discussion forum: a space for debate, interactions, comments, and suggestions. The exact form of this interactive forum between the collective PaaLabRes and the site’s users remains to be developed in detail.

It is very important for us to have immediate feedback on the technical aspects of the site, because we are developing it with our own limited means. Critical comments on the way users navigate in the architecture of the site, indicating what should be improved, are welcome.

Our intention is to organize the discussion forum in several territories. Firstly, a space for brief contributions by the site’s visitors (one page maximum): commentaries, critical feedback, encouragements, and suggestions. Secondly, longer texts concerning useful information for the site’s community: stories of various experiences, events, conferences, publications that can have a particular interest relative to the questions raised by PaaLabRes. Thirdly, more substantial propositions: research articles, artistic forms, poetical or political texts, etc. Finally, we also hope to organize specific spaces for debate linked to some of the site’s publications (see the end of the text of the station “Débat” on artistic research).

Calls for contributions on particular subject matters will be launched periodically, in order to enrich the existing lines of the site, or to create new ones.

The collective PaaLabRes is in charge of the process of presentation and editing of the various contributions in a spirit of exchange.

The digital space PaaLabRes is addressed to a French speaking audience, to those who do not master foreign languages, notably the English language. The use of French for most of its content is therefore deliberately claimed. At the same time, we are dedicated to be open to international contexts. This is why some translations are already proposed on the site and they will play an important role in future publications. Bilingual publications are possible in the case of original texts, which have not been already published. Each station includes an abstract in English or references to English versions of the texts. Contributions in English are very welcome.

 

Opérations culturelles

English


Épisode 1 : opération, opération culturelle


Pour un
itinéraire-chant
vers…

Ceci n’est pas un détournement de définition.

Des opérations culturelles, sont déjà, pour commencer, une opération…

 
Le choix d’une étymologie latine féministe

Opération vient du latin « operatio » (en rajoutant un « n » d’amour) qui signifie travail et ouvrage.
Une première origine se trouve dans « opus, operis », travail et ouvrage mais aussi œuvre, comme un produit fait, une production finie. Ou alors c‘est l’oposopus du suc et du jus, de sueur ou de sesterce, qu’on peut tirer d’un travail ou dans l’ouvrage… PaaLabRes s’appuye sur une deuxième origine, dans la féminisation antique (dans la féministe-action tactique) du premier opus, opéris : « opera », travail et ouvrage, mais aussi activité ; comme une production en train de se faire. Dans le cadre de certains usages, une idée de service, d’application et d’attention, de soin et de peine se trouve associée à ce mot.

Le verbe operor (travailler et ouvrager, mais aussi pratiquer, exercer, produire, effectuer) vient rajouter le sens d’avoir de l’effet. Il semble établi que les racines opérantes de la construction de tous ces mots sont :

  • ops, pour pouvoir, puissance, moyen, force avec une idée d’aide, d’appui et d’assistance
  • op, radical qui signale l’œil ou la vue (dans optique par exemple), et dans une forme d’extension, l’analyse (comme dans biopsie, analyse d’un tissu vivant), et aussi le préfixe indiquant « en face » et « pour » (opposer, poser en face)

Le “op” du hip hop, et le hype et le hop’, du hop’ là dit don’ !
Et le hit et le pote, du hops d’ouspille et du pitre doux de la pile
Stoppons là nos dindons
                          U n    t i m b r e    d e    p o s t e
No hip et no hope, no more dés-hope ou sur-hope ?
Suripo et sirop’s là là mon don dingue

[chanson en cours d’enregistrement]

 

Quelques utilisations précédentes d’opérations (pas encore culturelles ?)

Une opération, « action d’une puissance, d’un pouvoir qui produit un effet physique ou moral » [Cnrtl, A], est mystérieuse et magique. Dans les premiers écrits dont nous avons les traces, la RELigion n’était pas loin : avec la Sainte Operation, cinq taiss’ p’rient aussi dans ses opérations.

Comme « action faite selon un méthode, par la combinaison d’un ensemble de moyens » [Larousse, opérer 1-opération 2], une autre religion s’accapare ce terme : l’ECONomique et le COMMerce font des opérations spéculatives, financières et monétaires.
Les MATHématiques ont, eux, contribuer à préciser une opération comme « processus de nature déterminée qui, à partir d’éléments connus, permet d’en engendrer un nouveau » [Robert, 3]. Un passage par la “logique” est intéressant : « Les opérations logiques sont : l’identité, la négation, la conjonction, ou exclusif, ou inclusif, la non disjonction, l’inclusion, la non conjonction » [Cnrtl B2b, Guilh. 1969].

Et les MILITaires (c’est bizarre comme, dans les dictionnaires, « milit. » veut dire militaire, et pas militant)… Tiens, ils n’ont pas encore montrée le bout de leur nez sous masques à gaz. Ils ont aussi annexé l’opération comme « ensemble de mouvements stratégiques ou de manœuvres tactiques d’une armée en campagne, exécutés en vue d’atteindre un objectif donné » [Cnrtl, C1].

Mouvement, manœuvre… stratégie, tactique… cela évoque quelque chose… non, pas dans ce contexte, enfin plutôt contre ce contexte militaro-policier… l’« opération coup de poing » du Alpha Blondy de Brigadier Sabari : la violence policière (il y a déjà plus de 30 ans !). Et aussi un livre à contenu révolutionnaire… même une introduction ? Ah oui : L’invention du quotidien : 1. arts de faire de Michel de Certeau (éd. Gallimard, coll. Folio essais, 1990, éd. originale : UGE, 1980)… qui a pour « objectif d’expliciter les combinatoires d’opérations qui composent aussi une « culture » et d’exhumer les modèles d’actions des usagers dont on cache, sous le nom pudique de consommateurs, le statut de dominés (ce qui ne veut pas dire passifs ou dociles). Le quotidien s’invente avec mille manières de braconner. » [p. XXXVI]. Et voilà, ici : « opération » au pluriel, et pas très loin du mot « culture ». Nous y reviendrons.

Un autre grand domaine d’utilisation du terme est la MÉDecine. Une opération est alors une intervention chirurgicale pratiquée sur « sur une partie du corps vivant en vue de la modifier, de la couper, de l’enlever » [Robert, 4], « dans un but thérapeutique, préventif, esthétique ou expérimental » [Cnrtl D]. Un certain nombre, voir même un nombre certain est sans doute nécessaire après une opération militaire…

Les takatak et tikitik des mitraillettes,
la tactique dans la mitraille,
ça fait des morts, ça fait des morts !
Les clataclak et cliquetiquettes des cisailles,
des cathéters et des curettes,
réparent des corps, réparent des corps !

[chanson en cours d’enregistrement (bis)]

On notera que la fréquence relative d’utilisation du terme (dans le corpus sur lequel se base le Trésor de la Langue Française), fait plus que doubler entre la première partie et la deuxième moitié du XXe siècle : de 5103 à 11520 occurrences (rapportées à 100 mille mots [Cnrtl, Fréq. rel. littér.]). Est-ce grâce au progrès de la médecine ? Est-ce la faute à la multiplication des déploiements militaires ? Les deux mon capitaine d’opérette ? Ou alors à la financiarisation galopante ? Parce que ce n’est sans doute pas l’apparition de l’expression « opération culturelle » dans la conclusion de La culture au pluriel de Michel de Certeau [1974, pp. 205-222 dans la 3ième éd. au Seuil en 1993]. qui fut la cause d’un emballement d’opération…

Une opération culturelle ?

Une première nécessité est de préciser les mots culture et culturel. Nous pourrions multiplier les définitions qui ne limitent pas le champ dit culturel aux arts et artistes. Elles sont nombreuses, et il est fondamental de constamment les rappeler pour lutter contre la confiscation du travail des représentations par les artistes estampillés. Michel de Certeau écrit dans La culture au pluriel :

« S’il est vrai que n’importe quelle activité humaine peut être culturelle, elle ne l’est pas nécessairement ou n’est pas encore forcément reconnue comme telle. Pour qu’il y ait véritablement culture, il ne suffit pas d’être auteur de pratiques sociales ; il faut que ces pratiques sociales aient signification pour celui qui les effectue. » [pp. 121-122].

Et dans ce cadre, que peut-être une opération ?

Pour Michel de Certeau « l’expression culturelle est d’abord une opération ». Concernant cette idée, il indique trois instances : « 1. Faire quelque chose avec quelque chose ; 2. faire quelque chose avec quelqu’un ; 3. changer la réalité quotidienne et modifier le style de vie, jusqu’à risquer l’existence même. » [p. 218]
Pour lui l’opération est la rencontre d’une trajectoire particulière qui traverse un lieu, un « espace déjà construit ». Ici, les lieux sont des « places déterminées et différenciées » organisées par le système économique, les hiérarchies sociales, les manières de s’exprimer, les traditions, etc. [p. 220]. La trajectoire vient par des actions particulières modifier les conditions des lieux institués.

« Les opérations culturelles sont des mouvements. Elles inscrivent des créations dans des cohérences légales et contractuelles. Elles les zèbrent de trajectoires non pas indéterminées, mais insoupçonnables, qui altèrent, érodent et changent peu à peu les équilibres des constellations sociales. » [p. 221].

Un zèbre, c’est « l’âne sauvage » [Larousse] « au galop très rapide » [Robert], c’est un « individu quelconque » [Cnrtl], un « individu bizarre » [Robert]… Zébré, c’est le piéton qui fait entendre raison aux voitures… Zébrer, c’est rayer et enrayer le système, c’est strier et « marquer de lignes sinueuses » [Larousse], c’est signer Zorro…

Pour tous les zèbres qui ziguent et qui zaguent
Les constellations sociales, les sociétés en étoiles,
Pour tous les autres Zadig et les autres Zidane
qui dansent sans cérémonial et volent dans les toiles,
Avec le zédoaire des zazous de zizanie
Et du piment ! des érosions, mouvements, altérations,
Et du piment ! des collusions, changements, transformations.

[chanson en cours d’enregistrement (ter)]

En plus de tout ceci, nous gardons en tête quelques idées des premières définitions ci-dessus : production comme processus plutôt que comme produit fini, attention et application, puissance avec aide et appui, faire face à, engendrer du nouveau, intervenir (venir entre, survenir pendant, se trouver entre, interrompre, se mêler à, etc. un terme que les militaires et la médecine utilisent beaucoup aussi !) ; de même que la notion d’ensemble ou de séries d’actions.

Dans le prochain épisode, nous continuerons à travailler avec les éléments développés par Michel de Certeau. Son livre suivant, L’invention du quotidien (op. cit.), commence par : « La recherche publiée partiellement en ces deux volumes est née d’une interrogation sur les opérations des usagers, supposés voués à la passivité et à la discipline. » (p. XXXV). C’est la première phrase : le pluriel est arrivée et les expressions liées à « opération » sont très présentes dès cette introduction générale…

Affaire à suivre !

Nicolas Sidoroff – février 2016
Translation Jean-Charles and Nancy François

Liste des dictionnaires utilisés…

Rangés par ordre d’édition.

  • [Larousse] : Dictionnaire de la langue française, Lexis. (1992). Jean Dubois. Paris : éd. Larousse. (éd. originale en 1979).
  • [Robert] : Le nouveau Petit Robert (dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française). Texte de Paul Robert, remanié et amplifié sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey. (2008). Paris : Dictionnaires Le Robert (nvelle éd. millésime, 1ère éd. du Petit Robert en 1967, du nouveau Petite Robert en 1993).
  • [Cnrtl] : Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. [consulté en ligne : cnrtl.fr/definition/op%ération , le 11 février 2016]

Pour l’étymologie :

  • Dictionnaire Latin-Français. Félix Gaffiot. (1934). Paris : Hachette [consulté en ligne : lexilogos.com/latin/gaffiot.php, le 11 février 2016]
  • Les racines latines du vocabulaire français. Jacques Cellard. (2007). Bruxelles : De Boeck, éd. Duculot 4e édition.
  • Dictionnaire étymologique et historique du français. Jean Dubois, Henri Mitterand, Albert Dauzat. (2011). Paris : Larousse, ‘Les grands dictionnaires’.
  • Dictionnaire d’étymologie du français. Jacqueline Picoche, avec la collaboration de Jean-Claude Rolland. (2015). Paris : Le Robert, coll. ‘Les usuels’. (nvelle éd., 1ère éd. en 1992)

 


 Pour un itinéraire-chant vers…


 

La culture au pluriel

English


« La culture au pluriel appelle sans cesse un combat »

Lecture d’extraits de La Culture au pluriel de Michel de Certeau suivi d’un slam de Jean-Charles François.

 

[ 0’00 présentation ; 0’54 lecture ; 7’12 slam ]

 

MdCerteau_CultureAuPluriel_p213

MdCerteau_CultureAuPluriel_couv4

Musique, recherche et politique

English abstract


Zones de frottement entre le faire artistique et le faire politique, par quelques récits de pratiques
Ce texte est accompagné de 10 vignettes (une vision pleine écran est préférable).

 

« Politique », ici, concerne plus des logiques d’acteurs et d’actions (interactions et coopération, rapport de pouvoirs, domination, etc.), que les systèmes de politique publique ou des questionnements juridiques et administratifs.

Fabriquer de l’art, de la musique par exemple, fabrique du politique.

La délimitation de pratiques musicales coupées de leur dimension sociale constitue une représentation institutionnalisée qu’une entrée par le politique permet de mettre en cause. Ce phénomène n’est pas propre à la musique : nous pouvons tout aussi bien parler de la séparation entre pratiques artistiques et pratiques sociales (avec les notions d’art autonome ou de la tour d’ivoire du créateur, voir même du Créateur – toujours masculin ?), ou des coupures entre des pratiques de recherche et leur dimension sociétale […/…]

Pour voir le texte complet, les vignettes, les notes de bas de pages, etc.,
Cet article est codé différemment : cliquez – ici !

 

Karine Hahn et Nicolas Sidoroff – février 2016