Archives pour la catégorie entre lieux-dits

Itinéraire entre "Aifoon" et "Pressure/La Mer"

Alex Ness :
En 2010, Yoni Niv et moi avons créé une série de cinq partitions animées pour une performance à The Stone à New York (en octobre). Dès le début, nous nous sommes intéressés aux relations audiovisuelles. Bien que la partie vidéo et la partie audio aient été élaborées de concert, notre intérêt n’était pas de réaliser que l’une soit le reflet parfait de l’autre ; au contraire, nous avons voulu que leur relation puisse changer en cours de route, en devenant plus souple au fur et à mesure du développement de la pièce. En effet, une partie du plaisir éprouvé lors de l’élaboration de la pièce a été d’exploiter les attentes du public dans ce domaine : nous avons voulu qu’il continue à se demander quelle était la nature des relations qu’ils pouvaient observer.

 

Alex Ness : Le désir humain d’établir des relations entre les sons et les images – pour qu’elles

Jürgen De Blonde : L’utilisation de partitions graphiques dans la pratique

soient en quelque sorte “alignées” – est profond, en particulier quand l’image est considérée

quotidienne de Aifoon nous a amené à comprendre beaucoup mieux la nature de la

comme étant une partition. Après la deuxième performance de ces compositions, j’ai eu une

représentation graphique. Nous avons découvert qu’il y a de certaines similarités

conversation avec une amie du public qui m’a décrit avoir eu un sentiment de malaise lorsque

dans la construction, la lecture et la compréhension de ces dessins et qu’ils soulevaient

les relations audiovisuelles sont devenues plus floues. (C’était une compositrice, et donc

aussi un certain nombre de questions. Nous avons été amené à comprendre qu’il y a

particulièrement susceptible de détecter nos stratagèmes !)

des ‘règles’ implicites ou des conventions qui conduisent par elles-mêmes plus facilement à des généralisations et à d’autres aspects qui sont complètement subjectifs.

 

Jürgen De Blonde :
Cette vidéo a été réalisée il y a huit ans. Il s’agit d’une pièce qui a été jouée à la soirée d’ouverture d’une exposition sur les travaux et la philosophie de “Aifoon”, une organisation artistique et éducative. Les musiciens étaient invités à interpréter une partition graphique en vidéo. On leur a montré les symboles graphiques sur un écran. Le public présent avait aussi cette partition devant leurs yeux.

 

 

Itinéraire entre "London" et "Unbearable Lightness"

 

Carl Bergstrœm-Nielsen

La spécificité de la tradition musicale occidentale se caractérise par le fait que la musique est écrite. Après 1945, des formes non-traditionnelles ont émergé, sur fond de changements dans la culture, la société, les croyances et les styles de vie. La “Notation graphique” est juste un concept parmi d’autres – certaines notations se présentent comme des dessins, mais il existe aussi de nombreux types de signes, de mises en page et d’utilisations d’expressions verbales.

 

Guillaume Dussably

La notion d’interprétation d’une partition au synthétiseur modulaire m’a beaucoup questionné, j’ai donc choisi sur le principe des musiques génératives synthétiques des années 60 de côte ouest des Etats-Unis (Morton Subotnick, Don Buchla) de laisser une grande part de « l’interprétation » à la machine elle même, en intervenant le moins possible.

Mon travail sur l’élaboration de patch génératif a commencé en attribuant aléatoirement à mes différents points de patch (connectiques) de chaque module un nom de station de métro et en tirant au sort les itinéraires pour ensuite relier mes modules les uns aux autres, et je ne m’autorisais de modification de paramètre manuel (sur l’un des modules) que lorsqu’il y avait des changements de ligne de métro, en suivant du doigt les trajets sur un temps d’environ cinq minutes.

Cette façon de procéder (totalement nouvelle pour moi) m’a vraiment permis de redécouvrir mon instrument, chaque module prenait (pour chaque patch) une fonction tout à fait différente de celle prévue initialement par les constructeurs (un module prévu initialement pour faire de la modulation  devenait par exemple un générateur de sons du fait des routing/chemins entre les modules peu communs).

 

Carl Bergstrœm-Nielsen

Dans la littérature portant sur les nouvelles notations, on peut trouver de nombreux types d’énoncé : des présentations, des exposés promotionnels, des débats, des élaborations historiques, des théories, de la philosophie, des liens avec la pratique. Afin de réduire l’immense complexité induite par la contemplation d’une bibliothèque dans sa totalité, la bibliographie présente des synthèses plus longues que les titres, mais qui évitent de raconter toute l’histoire, en essayant de capturer certains de leurs aspects essentiels et les mots-clés qui les caractérisent, qui sont susceptibles de faciliter le périple du chercheur.

 

 

Itinéraire entre "ENM" et "Pariaud"

 

Trois partitions graphiques écrites et réalisées par des étudiant·es de l’atelier d’improvisation de Pascal Pariaud à l’ENM de Villeurbanne :

Charlen Guillot
Kerwin Marchand-Moury
Léa Vernet

 

Pascal Pariaud : Il y a plusieurs aspects à l’utilisation de partitions graphiques dans le cadre de mon travail pédagogique à l’ENM de Villeurbanne. Lorsque Fred Frith est venu en résidence à l’école, en 1994, cela a donné l’occasion après son départ d’organiser des ateliers d’improvisation. Dans ces ateliers, sur une année, il y avait des périodes où l’on travaillait sur les graphic scores de Fred Frith. En même temps (c’était aussi le début de mon travail au Cefedem Rhône-Alpes) il y avait aussi Individuum Collectivus de Vinko Globokar dont certaines pages  nous servaient aussi de support. Dans ces ateliers d’improvisation, petit à petit, les étudiants ont pu imaginer eux-mêmes des graphic scores. Ils apportaient leurs propositions de partition avec leurs propres modes d’emploi. J’en ai retrouvées quelques-unes. Donc il y a eu les ateliers d’improvisation qui généraient beaucoup de tentatives de travaux sur les graphic scores.

 

 

Itinéraire entre "Cefedem" et "Trio"

Dispositif musical en groupe [pour travailler autour des notions de procédures et de contexte] dans le cadre de la FDCE (Formation Diplômante en Cours d’Emploi) du Cefedem Auvergne-Rhône-Alpes, en janvier 2017 [proposé par Nicolas Sidoroff].
au départ de Treatise (1963-67) de Cornelius Cardew
Deux groupes, indépendants, choisissaient une page différente de cette partition et partaient avec les consignes suivantes :
-1) En 1h30 (pause comprise), vous avez à construire votre interprétation de cette page. Tout au long du travail, vous devez tenir une sorte de « journal de bord » régulier afin de garder une trace écrite de « comment vous vous y êtes pris ». Parmi des entrées possibles pour tenir ce journal : les idées que vous avez gardées (ou pas) et pourquoi, les choix que vous faîtes, leurs arguments, les temps de jeu musicaux, avec quelles consignes, les discussions, sur quoi, comment sont apparu·es et ont été traité·es les problèmes et/ou les questions, les ressources individuelles et/ou communes que vous mobilisez, celles qui aident (ou pas), etc.
Puis jouez cette interprétation à l’autre groupe, explicitez vos manières de faire ; discutons.

Eddy Schepens :
D’abord, toute production musicale est dépendante de ce qu’on nommera ici, en première intention, un contexte.
: Etienne Lamaison
Dans l’interprétation des partitions graphiques, la collaboration conditionne le choix de ses partenaires : s’assurer que ceux-ci sont dans un volontariat, un désir de réaliser jusqu’au bout le projet qui sera défini entre les participants, se compromettant à respecter les règles. Dans l’instant du jeu, l’attitude doit être une attitude éminemment sociable, sans laquelle il n’y a pas de jouer ensemble possible : ne pas imposer aux autres, être avec soi-même et avec les autres en même temps, ne pas prendre le pouvoir mais décider sans cesse pour et avec les autres, ne pas se perdre soi-même, s’effacer quand on a rien à dire, oser prendre la parole, écouter constamment.
E. Schepens :
Un contexte est ce qui a rassemblé ou rassemble des musiciens, des instruments (y compris électroniques), des procédés de diffusion spécifiques (en temps réel, par Internet, via les CD ou DVD…), un public (fût-il non présent en temps réel), les pactes d’audition/réception de ce ou ces publics (pactes eux-mêmes travaillés par l’histoire de l’édition phonographique ou écrite, etc.), des modes de coopération entre les musiciens, bref une foule de médiateurs au sens que donne Antoine Hennion à ce terme, c’est-à-dire agissant, et non simple intermédiaires-réalisateurs d’une intention – d’une « œuvre » – première.
: E. Lamaison
Il s’agit d’acquérir une expérience commune : jouer le plus possible ensemble, passer du temps pour se comprendre et partager à travers la parole ou à travers le jeu paraissent des conditions indispensables à la réalisation de partitions graphiques.
E. Schepens :
Insistons encore sur l’apport des travaux de Howard Becker en reformulant l’importance qu’il accorde aux « conventions » : il les décrit très précisément comme ce qui permet aux artistes de « faire [leur] monde de l’art », c’est-à-dire de le produire.

Dans une deuxième phase :
-2) Décidez de deux « styles » (chanson française de la Renaissance italienne, prélude piano de Debussy pour un salon littéraire, worksong de pénitencier au début du siècle dernier, be-bop très mais très rapide, afro-beat façon Fela Kuti façon Egypt’80, ambient-rave de lever de soleil sur la mer, etc.) dans lesquels vous allez faire une interprétation de cette même page de Treatise. Un de ces styles doit être « suffisamment connu » par au moins quelques personnes dans le groupe (c’est-à-dire qu’on peut faire l’hypothèse qu’il y a déjà suffisamment de connaissances en présence pour commencer à travailler). L’autre doit être « suffisamment méconnu » par l’ensemble du groupe (hypothèse qu’il y ait besoin de chercher et construire des références pour commencer à travailler).
En 1h30 (pause comprise), préparez une interprétation de cette même page dans chacun des deux styles choisis, en tenant un « journal de bord ». Vous devez être capable d’argumenter les relations entre votre réalisation et le « style » correspondant.
Puis jouez ces interprétations à l’autre groupe, explicitez vos manières de faire ; discutons.

: E. Lamaison
Si aucune restriction ne vient empêcher la mise en œuvre d’une partition graphique, le groupe qui s’apprête à travailler ensemble doit être en mesure de créer et maintenir des liens qui lui permettront de pouvoir s’exprimer en toute confiance, en sachant qu’on sera soutenu tant au niveau musical humain, en sachant également que chacun apporte au groupe des éléments indispensables.
E. Schepens :
Les modes de coopération élaborés et utilisés par les artistes sont donc bien autant de pratiques que des musiciens élaborent et partagent pour pouvoir produire leurs musiques (dans tous les sens de ce terme), et ce à l’intérieur d’une enveloppe déterminée par le système de « conventions » qu’ils ont en commun, ou qu’ils décident de partager l’espace d’un moment pour une production musicale particulière. Il est donc plus que pertinent de donner aux musiciens l’occasion de repérer divers systèmes de coopérations et de conventions, de manière au passage à réfléchir les siens propres.

Cornelius Cardew, Treatise
par Pedro Branco (percussion), José Leitão (piano)
et Etienne Lamaison (clarinette).

 


Le texte d’Eddy Schepens est tiré de son article “Différences de genres musicaux ou différences de pratiques ? Une voie pour renouveler les pratiques pédagogiques en musique”, dans les Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique, Volume 15, N°1, « L’apprentissage et l’enseignement de la musique : Regard francophone international », printemps 2014. Ce numéro reprend des communications présentées à l’occasion du colloque international « L’apprentissage de la musique : son apport pour la vie de l’apprenant du XXIe siècle » tenu au Centre des congrès de Québec, du 22 au 24 septembre 2012.

Des extraits de cet article ont été distribués aux étudiant·es de la Formation Diplômante en Cours d’Emploi (FDCE) du Cefedem AuRA au cours d’un travail sur Treatise de Cornelius Cardew en janvier 2017.

Le texte d’Etienne Lamaison est tiré de sa thèse de doctorat
L’interprétation des partitions graphiques non-procédurales,
Université d’Evora, Portugal, avril 2013.

 

 

 

Itinéraire entre "Aifoon" et "…out of the air…"

Elaine Barkin :
“…out of the air…” pour cor de basset, bande quatre pistes et partition graphique, a été créé en collaboration avec Georgina Dobrée (1930-2008) et cette pièce lui est dédiée. Nous nous sommes rencontrées en 1957 aux Darmstadt Ferienkurse für Neue Musik ;

Jürgen De Blonde :
Cette vidéo a été réalisée il y a huit ans. Il s’agit d’une pièce qui a été jouée à la soirée d’ouverture d’une exposition sur les travaux et la philosophie de “Aifoon”, une organisation artistique et éducative. Les musiciens étaient invités à interpréter une partition graphique en vidéo. On leur a montré les symboles graphiques sur un écran. Le public présent avait aussi cette partition devant leurs yeux.

Aifoon est une organisation belge basée à Gand (Flandres)

elle était la clarinettiste de l’International Chamber Ensemble,
tandis que je participais au Séminaire de composition.

qui est centrée sur le son et l’écoute, comment le son
nous affecte et quels sont nos rapports à l’écoute.

Après cela nous avons continué à rester en contact par correspondance grâce au US Postal Service et au Royal Mail, et en personne de temps en temps.

Au début de l’année 1988, Georgina m’a demandé de composer une œuvre pour cor de basset, un instrument qu’elle avait trouvé dans un rebut. Je lui ai demandé de m’envoyer un enregistrement de démonstration des qualités sonores typiques et idiosyncratiques de cet instrument ainsi que ses différents registres, tout ce qu’elle trouvait intéressant de me faire entendre.

Dans le passé, nous avons souvent utilisé les partitions graphiques et la notation graphique comme outils dans des ateliers pour aider les participants à réfléchir sur la nature du son, aux difficultés liées à la notation des sons et à son caractère subjectif,

Elle m’a rapidement envoyé une cassette et a écrit que « … cela a été très difficile de juste faire des choses… de jouer en inventant de toute pièce [just play out of the air]… » Mais c’est pourtant bien ce qu’elle avait fait. J’ai transcrit plusieurs de ses improvisations et j’ai tout de suite décidé de créer une bande quatre pistes et des pages de partition graphique avec laquelle elle pourrait interagir en co-création, ses mots étant utilisés dans le titre : “out of the air”.

et aussi comme une introduction à la composition et au montage multipiste.

Même si j’avais improvisé de manière collaborative depuis plusieurs années, je n’avais jamais – ni elle – composé auparavant une œuvre de ce type. Il me fallait abandonner le mode de fonctionnement conventionnel du compositeur en termes de propriété intellectuelle et pourtant continuer à fournir un objet pour stimuler l’activité ; elle avait à prendre plus de responsabilité par rapport à ce qui est habituellement demandé aux interprètes.

Aifoon a toujours travaillé avec des sons bruts, des bruits concrets de la vie quotidienne, c’est-à-dire : pas de mots, ni de musique.

Les symboles graphiques dans la vidéo ont été réalisés par plusieurs enfants qui ont participé à un des ateliers de Aifoon. Comme exercice d’introduction, nous demandons souvent aux participants d’apporter un son avec lequel il puisse se présenter eux-mêmes.

Elle a donné son accord et j’ai commencé par enregistrer mon propre jeu sur un clavier électronique crumar (des sons de grognements qu’on entend au début de la pièce),

Les sons préenregistrés ne sont pas autorisés, ni les sons synthétiques, seulement les objets ou les gestes (ou leur combinaison).

des bols tibétains, des wood-chimes, un kalimba, des petites cymbales chinoises et des shakers africains.

J’ai tenté de dessiner une cartographie du temps des quatre pistes enregistrées, afin de disposer d’une version visuelle des sonorités de la bande. Plusieurs passages déformés – par l’utilisation du délai et de la réverbération – de l’enregistrement initial envoyé par Georgina sur le cor de basset ont été inclus sur une des pistes, pour qu’elle puisse à la fois dialoguer avec moi et en duo avec elle-même. Il était crucial de produire une bande sonore comprenant des segments opaques et lumineux de durées inégales, et aussi beaucoup de silences, pour que pendant ces derniers Georgina soit entendue clairement, et que la bande son puisse avoir un intérêt musical substantiel en tant que tel.

Ces sons sont ensuite enregistrés et les enfants participants ont pour tâche de faire un dessin de leur son. Nous leur demandons explicitement de ne pas dessiner la source du son, mais de réaliser une représentation graphique du son, en prenant en compte l’enveloppe, la forme, la structure, les strates (si applicables). Après la réalisation des dessins, une composition collective est souvent développée à partir de ceux-ci. Nous les affichons sur le tableau noir dans une certaine séquence, à la fois horizontalement et verticalement, et un certain nombre d’essais d’interprétation de la partition sont réalisés. Parfois nous avons même fait un montage avec les sons enregistrés, à partir de la partition collective. C’est l’origine des symboles sur la vidéo.

Simultanément j’ai commencé à travailler sur les esquisses des pages de la partition en incorporant des extraits visuellement “artistiques” de ma transcription des sons produits par Georgina sur sa cassette. Les moyens graphiques utilisés étaient la plume, l’encre et l’aquarelle et j’ai inclus des slogans et des interrogations, utilisant différents styles d’écriture des caractères, dans l’intention de stimuler et de provoquer Georgina dans ses improvisations.

Avec l’exposition, nous avons voulu aller un peu plus loin en utilisant la partition dans des perspectives d’une exécution publique. Nous avons demandé à des musiciens d’interpréter les symboles de la partition. Les musiciens étaient Marc Galo, guitare électrique, Stefaan Smagghe, violon, et Thomas Smetryns, dulcimer de table.

Six feuilles (12 pouces X 16) de carton blanc de poids moyen ont été dessinées-peintes-griffonnées-tachées, pour être choisies (ou non) et placées dans n’importe quel ordre sur des pupitres, pour que Georgina puisse les interpréter en se déplaçant librement.

J’ai aussi dirigé l’interprétation des symboles individuels des musiciens pendant la première partie, au moyen de lampes. J’ai mis en place trois lampes que je pouvais allumer ou éteindre à l’aide d’un variateur d’intensité, une lampe par musicien. De cette manière je pouvais leur indiquer quand jouer de manière non intrusive.

 

 

Itinéraire entre "Cardew" et "Saïki"

 

Cardew :
Avant de rejoindre le groupe d’improvisation AMM, Treatise a été un essai élaboré de notation musicale graphique…
Saïki :
Mais c’est vrai que Treatise a un côté, je trouve, très brut, très aride, il n’a pas de couleur…
Cardew :
…après cette expérience au sein d’AMM, la partition est devenue simplement une musique graphique.
Saïki :
C’est très radical aussi dans le trait…
Cardew :
…que je ne peux que définir comme une partition graphique qui produit sur le lecteur, sans aucun son, quelque chose d’analogue à l’expérience de la musique…
Saïki :
Et je pense que ça peut se rapprocher de réflexions, de travaux de musiciens improvisateurs qui prennent un propos, une singularité, quelque chose qui leur appartient et qu’ils développent, affinent, ressentent, travaillent sur cette chose unique.
Cardew :
…un réseau de lignes et d’espaces sans noms qui poursuivent leur propre géométrie sans aucune liaison avec des thèmes ou des modulations, avec des séries dodécaphoniques et avec leurs transformations, avec les règles ou les lois de la composition musicale et toutes les autres inventions de l’imagination musicologique.
Saïki :
Pas mal d’artistes dans ces champs-là se centrent beaucoup sur un mode, une façon de faire, et je pense que, du coup, Treatise peut faire écho à ces fonctionnements-là.